Un débat musclé à Limoilou : à qui accorder sa confiance ?

Le débat des candidat.e.s dans Limoilou et Lairet-Maizerets au Patro Roc-Amadour. De gauche à droite : Suzanne Verreault, Madeleine Cloutier, Claude Villeneuve, Simon Levasseur, Florent Tanlet, Omar Berri, Charlotte Vachon et Marie-Claude Lavoie. Crédit photo : Sophie Williamson.

Jeudi soir avait lieu un débat organisé par un collectif citoyen, en collaboration avec Monlimoilou, CKRL 89,1 et nous-même, opposant les candidats aux élections municipales des districts de Limoilou et Lairet-Maizerets pour adresser les enjeux du secteur.

À l’ordre du jour : la qualité de l’air, la mobilité active, la ZILE, les ruelles, les terrains d’Hydro Québec et la gentrification. Voici la liste des participants :

  • Suzanne Verreault et Claude Villeneuve (Équipe Marie-Josée Savard) ;
  • Marie-Claude Lavoie (Québec 21) ;
  • Madeleine Cloutier (Transition Québec) ;
  • Simon Levasseur et Omar Berri (Démocratie Québec) ;
  • et Florent Tanlet et Charlotte Vachon (Québec Forte et Fière).

Qui sont-ils ?

Québec 21 :
Marie-Claude Lavoie, candidate dans Maizerets-Lairet, a toujours été engagé dans la communauté.  En 1997, elle a pris la direction du Centre Mgr Marcoux qui est devenu « un organisme incontournable dans le secteur ». « Je connais les enjeux et les défis des organismes communautaires », affirme-t-elle.

Transition Québec :
Madeleine Cloutier, candidate dans Limoilou, est enseignante en art et médiatrice culturelle. « J’ai peur pour l’avenir, lance-t-elle, avec la mauvaise qualité de l’air, la gentrification, la difficulté des déplacements à pieds et à vélo. On ne veut plus que Limoilou soit le dépotoir de mauvais projets. »

Équipe Marie-Josée Savard :
Suzanne Verreault, conseillère élue pour la première fois en 2009, sollicite un 4e mandat dans le district de Limoilou. « J’ai relevé plusieurs défis avec force et vigueur, soutient-elle. Des changements s’imposent et c’est pourquoi à la Ville nous avons adopter une stratégie de développement durable. »

Claude Villeneuve, candidat dans Maizerets-Lairet, est un ancien chroniqueur connu au Journal de Québec. « J’ai décidé de m’impliquer pour faire valoir mes valeurs et les projets qui me tiennent à coeur, affirme-t-il. La ville de Québec va bien, mais elle pourrait aller bien pour encore plus de gens. » 

Démocratie Québec :
Simon Levasseur, candidat dans Limoilou, a étudié en économie et a grandi à Limoilou. « Je me suis engagé pour faire valoir les intérêts des citoyens », explique-t-il.

Omar Berri, candidat dans Maizerets-Lairet, est un horticulteur de profession originaire du Maroc et il « est là pour faire avancer la ville ».

Québec Forte et Fière :
Charlotte Vachon, candidate dans Maizerets-Lairet, souhaite « prendre part à un mouvement pour l’avenir avec beaucoup d’humilité ». « Je veux être une voix pour les citoyens pour qu’on décide ensemble de notre avenir », soutient-elle.

Florent Tanlet, candidat dans Limoilou, explique qu’il a « une vision à développer avec les citoyens ». « Votre monde a été négligé, lance-t-il, et les dossiers stagnent. On veut plus de rues partagées et une piétonnisation d’une partie de la 3e avenue. »

La qualité de l’air

L’enjeu majeur de la qualité de l’air dans le secteur est reconnu par tous les candidats.

« Le dossier de l’incinérateur, débute Florent Tanlet, ça a pris 15 ans pour que ça bouge un peu. Nous proposons un autre angle, soit d’agir à la source du problème. » Il suggère donc des mesures comme encourager le compostage, interdire les produits à usage unique et ajouter des jardins communautaires, des toits verts et des pistes cyclables.

Pour Marie-Claude Lavoie, il faut d’abord éviter de couper les arbres avec un tramway et opter pour un métro léger. Elle affirme aussi vouloir favoriser les projets d’agricultures urbaines.

Madeleine Cloutier explique que Transition Québec a comme objectif de fermer l’incinérateur en 2030 et de fermer deux fours dans les quatre prochaines années. « On a aussi un problème de camionnage lourd causé par la présence de l’incinérateur, ajoute-t-elle, déplacer les centres de tri aux extrémités atténuera cette circulation de transit. »

« Il faut agir, reconnait d’emblée Omar Berri, la Ville doit intervenir. » Il propose donc d’installer des détecteurs de contaminants dans tous les quartiers.

Suzanne Verreault assure que « toutes les actions nommées sont déjà en court ». Elle rappelle aussi que « le plan de développement durable de la Ville vise à lutter contre le réchauffement climatique ». « Je suis là depuis 12 ans, explique-t-elle en donnant des exemples de ce qui a été fait depuis, j’ai réussi à tout mettre ça en place. » 

Limoilou : « la poubelle de Québec » ?

La conseillère pour le district, Suzanne Verreault, trouve « difficile d’entendre des mots comme « poubelle » pour parler de Limoilou ». « On a augmenté de 3% la canopée en Basse-Ville, on va multiplier les jardins communautaires et on mettra en place la collecte des résidus alimentaires en 2022 », soutient-elle.

Il faut toutefois noter que la canopée a diminué de 1% dans l’ensemble de la Ville. Marie-Claude Lavoie en a profité pour noter aussi que la canopée à Limoilou « est plus basse que partout ailleurs », avec un taux de 17%, alors qu’elle est de 31% ailleurs.

Florent Tanlet a renchérit en affirmant qu’au rythme où va la Ville en ce moment, « ça prendra 750 ans pour atteindre l’objectif ». Ce à quoi Suzanne Verreault répond que « l’effort est à venir » et que « tout est planifié ».

Omar Berri soutient que le plus important est de « consulter la population ». Selon Madeleine Cloutier, cela passe par « donner des pouvoirs décisionnels aux conseils de quartier pour que la démocratie ne se vive pas une seule fois aux quatre ans ».

Une mobilité plus sécuritaire

Selon Marie-Claude Lavoie, les citoyens doivent connaitre les avantages du projet VALSE par rapport au tramway. « Le tramway a une vie durable d’environ 35 ans contre 75 à 100 ans pour un métro », explique-t-elle. Elle ajoute aussi que pour améliorer la mobilité, il faut travailler à interconnecter les pistes cyclables.

« Le tramway offrira une meilleure mobilité, poursuit Claude Villeneuve, mais il faut aussi plus de place pour le transport actif. » Son parti promet d’investir 60 millions $ dans les prochaines années pour améliorer la sécurité routière, par exemple en élargissant les trottoirs.

Charlotte Vachon soutient aussi que « le tramway est la colonne vertébrale d’une offre pour une mobilité plus vaste ». « On veut bonifier le projet, ajoute-t-elle, entre autre pour préserver la canopée. »

« Il faut penser la ville selon le trafic qu’on veut voir, affirme Madeleine Cloutier, pas celui avec lequel on est pogné. » Son parti propose donc une « Vision 0 accident » qui vise à sécuriser certains endroits dangereux du district, comme la 1ère avenue, la 8e avenue et la 18e rue. Elle ajoute que son parti est « très pour » le tramway.

Simon Levasseur explique qu’il y a encore « beaucoup de questions à répondre concernant le tramway ». Son parti est en faveur du projet, mais contre la plateforme qui « diviserait les quartiers » et l’abattage d’arbres.

Crédit photo : Sophie Williamson.

Métro vs tramway : des échanges musclés

« Le BAPE l’a dit, défend Marie-Claude Lavoie, le projet du tramway n’est pas adapté à la ville de Québec. »

Suzanne Verreault demande alors « comment Québec 21 va faire pour ne couper aucun arbre avec le projet de métro ». Ce à quoi Marie-Claude Lavoie répond « qu’on décide où le tunnelier entre et sort » et explique qu’un géologue a travaillé sur le projet.

Prêt à attaquer, Florent Tanlet sort un article pour lire un extrait. « Les experts affirment que vous n’allez pas rentrer dans vos coûts et dans le temps, affirme-t-il. Aussi, les arbres ont des racines… » 

Marie-Claude Lavoie explique qu’il ne s’agit pas d’un métro lourd et que « les experts ne disent pas ce que prétend Monsieur Tanlet ». Il y a donc un désaccord d’experts que nous ne saurons résoudre.

La candidate de Québec 21 invite les citoyens à consulter leur page Facebook pour avoir les informations.

La ZILE

Le projet de la Zone d’innovation Littoral Est a beaucoup fait réagir les citoyens.

Madeleine Cloutier affirme qu’il s’agit d’une « magnifique opportunité » pour le secteur. « Au lieu de vendre les terrains à des multinationales, lance-t-elle, nous proposons une co-gouvernance avec les citoyens. On envisage notamment des logements sociaux et un mur vert. » 

« On est contre le projet ZILE, assure Omar Berri. Tout le monde s’inquiète. On s’engage à un moratoire et à des consultations avec les citoyens. » Il suggère aussi des logements sociaux, des parcs et des commerces de proximité.

Charlotte Vachon avance que la Ville a le potentiel de faire des « paradis pour les familles ». Elle explique que le ZILE a un énorme potentiel économique, mais qu’il y a « du bon et du mauvais ». « C’est bien qu’il y ait des nouvelles technologies, mais ça ne doit pas être au détriment de l’environnement », conclut-elle.

Claude Villeneuve précise que « la Ville n’a vendu aucun terrain » puisqu’elle est au processus de consultation. « Si quelqu’un vous dit qu’on peut faire des logements sociaux, ajoute-t-il, soit il ne connait pas le dossier ou il vous vend du rêve. Les terrains sont contaminés et ça prendrait plusieurs centaines de millions $ pour les décontaminer. »

Objection à laquelle répond Omar Berri qui suggère que le « fédéral peut nous aider à décontaminer » et qu’il faut « gérer la contamination ».

Marie-Claude Lavoie présente l’engagement de son parti d’offrir 5000 logements sociaux et 1000 logements à prix abordable. « Pour le projet ZILE, chaque item va être examiné », affirme-t-elle.

« On entend beaucoup « on va travailler avec les citoyens », renchérit Madeleine Cloutier, mais qui s’engage à une gouvernance partagée sur ces terrains-là ? » Ce à quoi Claude Villeneuve répond : « Je dis oui, mais il faut en discuter. » Suzanne Verreault explique par ailleurs que la Ville a une nouvelle politique de consultation publique qui « ajoute un mois à la démarche consultative ».

Les terrains d’Hydro Québec

Pour la question des terrains d’Hydro Québec, tous les candidats affirment vouloir « attendre de consulter les citoyens ». Suzanne Verreault assure qu’une « discussion avec le conseil de quartier a lieu depuis quatre ans ».

Madeleine Cloutier explique que « son parti veut aller plus loin ». « On ne veut pas seulement consulter la population, mais la faire participer avec une gouvernance partagée », soutient-elle.

La gentrification

Pour répondre au problème de la gentrification dans le secteur de Limoilou, Simon Levasseur propose de lutter contre l’hébergement touristique ainsi qu’un moratoire sur la conversion des logements en condos.

Marie-Claude Lavoie affirme que son parti s’engage à bonifier l’enveloppe des organismes communautaires à 10 millions $.

Pour l’Équipe Marie-Josée Savard, ce sont 2300 logements sociaux ainsi que 300 logements abordables qui sont promis le long du tramway.

Madeleine Cloutier explique qu’un logement abordable est dit « abordable » parce qu’il est à 90% du prix du marché. Selon elle, dans la situation actuelle, c’est encore inabordable pour trop de gens. Son parti propose 5000 logements sociaux et un règlement pour que les nouveaux immeubles contiennent 20% de logement social et 20% de logement familial.

Du côté de Québec Forte et Fière, c’est 2600 nouveaux logements qui sont promis, avec 20% de logement abordable. Florent Tanlet explique aussi que son parti mettra en place des « contrats de location à très long terme » auprès de la Ville, « ce qui permettra à l’argent de revenir à la communauté et de diminuer les coûts des loyers ».

La Ville devrait-elle devenir propriétaire des ruelles ?

Suzanne Verreault affirme que la « Ville fait ce qu’elle peut ». Elle propose de consulter les citoyens pour leur exposer les trois solutions concernant les ruelles et leur présenter les conséquences si la Ville en devient le propriétaire.

Madeleine Cloutier, Florent Tanlet et Simon Levasseur affirment de leur côté vouloir acquérir les ruelles et accusent l’administration sortante de ne pas « faire les efforts nécessaires » ou de « manquer de leadership ».

Prenant pour exemple Montréal, Madeleine Cloutier affirme qu’il existe « différentes manières de faire » et que devenir propriétaire « rendrait service aux citoyens ».

« La Ville a échoué, lance Florent Tanlet, elle refuse de prendre en main le dossier des ruelles. » Il assure que Québec Forte et Fière « assumera le leadership et l’audace que ça prend pour négocier auprès de Revenu Québec ».

« Il faut passer à un autre niveau, affirme dans le même esprit Simon Levasseur, il va falloir que la Ville explique à quelles négociations elle se butte et pourquoi il n’y a pas d’avancement. » 

« Le ministère du revenu est rendu à nous faire signer des ententes, explique Suzanne Verreault. C’est avec les gens qu’il faut discuter et la Ville a toujours appuyé les initiatives. » 

Florent Tanlet en a profité pour lire un autre article qui prétendait que « le ministère du revenu était prêt à vendre les ruelles pour 1$ ». Suzanne Verreault affirme que « la situation a changé » et qu’il « faut faire connaître aux citoyens les impacts financiers d’une telle acquisition ».

Le jeu du « Gagnant/perdant »

Si nous avons à souligner la performance d’un candidat, c’est sans trop d’hésitation que nous décernons notre médaille à Madeleine Cloutier. Calme et en pleine possession de ses moyens, elle répond toujours clairement et avec assurance aux questions. Elle présente avec concision les engagements et les mesures concrètes qu’elle entend mettre en place pour régler les problèmes, montrant qu’elle les maitrise et, les vivant elle-même à chaque jour, y est sensible. Au besoin, elle réfère plutôt aux idées qui guident son parti et à la vision globale et cohérente qu’il souhaite mettre en place. Notons d’ailleurs qu’elle est la seule candidate à s’être présenté au débat en vélo.

La perdante est sans aucun doute Marie-Claude Lavoie qui malheureusement n’a pas réussi à présenter adéquatement son projet principal qui est le métro léger et à se faire entendre. Elle a montré peu de maitrise des autres enjeux et questions, répétant souvent les engagements de son parti qui concerne l’ensemble de la ville de Québec.

Il faut toutefois noter que les autres candidats ont fait preuve d’une certaine arrogance et dérision à son égard qui se sont aussi partagées dans la foule et qui ont donné lieu à plusieurs séances de moquerie.

Moments forts

« « La Ville veut », mais elle n’a pas l’audace de régler le problème en assumant la responsabilité de s’occuper des ruelles », Madeleine Cloutier.

« Chacun parle de ce qu’il parle, mais le tramway c’est nous qui l’avons proposé en premier », Omar Berri.

« Allez voir sur Facebook », Marie-Claude Lavoie sur le métro léger.

« Vous nous copiez », Suzanne Verreault à l’endroit de Florent Tanlet.

« Bien content d’avoir de ses nouvelles », Claude Villeneuve qui réagit à la mention du géologue par Marie-Claude Lavoie.

« J’invite les citoyens à s’informer, parce que ça se peut qu’au lieu de rire de Québec 21, vous riez jaune », Marie-Claude Lavoie à l’éventualité que le projet du tramway s’actualise.

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