Les quatre défis de Démocratie Québec

Jean RousseauJean Rousseau, le chef de Démocratie Québec, devant l'Hôtel de Ville. Crédit photo : Sophie Williamson.

Quatre années passées dans l’opposition à l’Hôtel de Ville ont permis à Jean Rousseau de faire ses classes, mais surtout de gagner le respect tant de ses collègues que des citoyens qu’il représente. Mais il faudra sans doute bien des efforts pour que cette récompense d’estime se traduise par plus de sièges pour son parti sur la rue des Jardins. Pour y arriver, Démocratie Québec devra se montrer à la hauteur de quatre défis. 

Par Gabriel Côté

« Rien ne sert de courir ; il faut partir à point. » Jean Rousseau ne dispose ni du parti le mieux organisé, ni de la machine électorale la plus efficace, ni de l’élan de la nouveauté qui suffit parfois, sans autre raison, à porter un homme au pouvoir.

Or, si son parti parait quelque peu essoufflé, comme fatigué par les défaites électorales successives, on ne peut pas en dire autant de Jean Rousseau. Ce dernier a commencé, avec une énergie remarquable, à faire campagne très tôt, alors qu’on préférait ailleurs attendre l’automne « afin de ne pas écœurer les citoyens ».

Mais malheureusement, il ne suffit pas d’imiter la tortue pour battre le lièvre. Le sort de Démocratie Québec pourrait bien dépendre, d’ailleurs, de ce que son chef accepte, ou non, de se plier aux exigences de la situation dans laquelle le parti se trouve en ce moment.

1. Se donner des objectifs réalistes

Lorsque nous nous trouvons, par un concours de circonstance, près du pied du mur, deux options se présentent à nous : on peut ou bien jouer le tout pour le tout, et risquer ainsi de tout perdre, ou bien encore essayer de reprendre un peu de terrain en espérant pouvoir se refaire en se « hâtant avec lenteur ».

Voilà à vrai dire les deux voies qui s’ouvrent devant Jean Rousseau à l’aube du déclenchement des élections municipales. Si le chef de Démocratie Québec se donne pour objectif de remporter la mairie et un grand nombre de fauteuils, il y a bien des chances qu’il se réveille « tout nu » au matin du 8 novembre. Pour préserver ses acquis et dans l’espoir de quelques gains (ce qui est tout sauf impossible), Jean Rousseau devra concentrer ses efforts d’abord dans son propre district, puis dans quelques autres qui sont à sa portée. Concrètement, cela signifie qu’il faut à Démocratie Québec des candidatures solides au centre-ville et dans l’arrondissement de Sainte-Foy – Sillery – Cap-Rouge, où est concentrée la majorité de ses appuis.  

Or, la marge d’erreur est très mince. Les autres partis ont déjà présenté des candidats très solides dans le district de Montcalm – Saint-Sacrement, où une victoire de Démocratie Québec aurait été naturelle. Le déroulement des événements rend ce scénario de plus en plus improbable. Pour l’heure, la candidature la plus solide du parti semble être celle de Bertrand de Lépinay dans le district du Plateau. C’est là que Jean Rousseau pourrait concentrer ses énergies, s’il espère doubler le nombre de conseillers démocrates à l’Hôtel de Ville.

2. (Ré)apprendre à jouer en équipe

Depuis 2017, Jean Rousseau est un cavalier solitaire au conseil municipal. Disposant de moins de ressources que ses adversaires, il a néanmoins démontré une efficacité remarquable, et une maîtrise des dossiers qui surpasse de beaucoup celle du commun des élus. Mais c’est une chose que de jouer seul, et c’en est une autre que d’avoir des coéquipiers – les champions de tennis ne sont pas les mêmes en simple et en double.

Sans dire que Démocratie Québec a éclaté au cours des dernières années, force est de constater qu’il y a eu d’importantes défections au sein du parti. L’aile la plus à gauche – si ces catégories ont quelque sens – a quitté le navire pour former sa propre opération sous le nom de Transition Québec. Cela rend la tâche encore plus difficile à Jean Rousseau, qui doit à la fois courtiser les électeurs en se positionnant « au centre », tout en essayant d’éviter une saignée trop considérable à sa gauche.

Il n’est pas farfelu d’imaginer Jean Rousseau être encore une fois le seul élu de sa formation politique au lendemain du 7 novembre. Dans ce scénario, il se pourrait bien que les élections de cette année soient les dernières de Démocratie Québec. Que ferait alors Jean Rousseau ? Accepterait-il de se joindre à un autre parti ? Ou bien siégerait-il comme indépendant, comme l’a fait Yvon Bussières avec succès pendant plusieurs années ? Car c’est une vérité qu’on se dissimule souvent : il y a des gens à qui travaillent mieux dans la solitude.

3. Faire preuve d’audace

La politique municipale ne soulève que rarement les grandes passions. Ainsi bien des gens ignorent tout à fait jusqu’à l’existence de Jean Rousseau et de Démocratie Québec. Cela fait que Jean Rousseau sera obligé de faire preuve d’audace dans ses sorties, pour attirer l’attention et peut-être frapper l’imaginaire des électeurs – au risque de passer pour un original. Rousseau a bien fait dans cette optique en se déclarant en faveur de la fusion entre Québec et Lévis, et il y a quelques mois en portant un chandail des Canadiens lors d’un point de presse. Il sera intéressant de voir quels tours le candidat à la mairie sortira de sa besace à mesure que nous approcherons de la date du vote.

4. Abandonner la rhétorique du sous-estimé

C’est peut-être vrai, c’est peut-être faux, mais c’est certainement maladroit. À plusieurs reprises déjà on a entendu Jean Rousseau déclarer qu’il est sous-estimé. Le problème avec cette rhétorique est tout simple : personne n’a jamais gagné l’estime d’autrui en faisant valoir qu’il mérite plus de reconnaissance qu’il n’en a. De toute façon, les électeurs ne votent pas en fonction du mérite des candidats, mais tout au plus peut-être en fonction de leur apparence de mérite.

En répétant qu’il est sous-estimé, Rousseau montre au public qu’il part de loin et il freine ainsi l’élan qu’il s’évertue à se donner. S’il veut vraiment mériter la faveur de l’électorat, le chef de Démocratie Québec doit faire la démonstration qu’il est mesure de se placer au-dessus de la mêlée en affichant un juste mépris pour les sondages et pour le bavardage dans les médias. Sans quoi il se peut fort bien qu’il contribue lui-même à faire des impressions qu’il veut combattre une réalité sans appel.  


Lisez les défis d’Équipe Marie-Josée Savard et de Québec 21.

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