Chronique : Voyager ou ne pas voyager, là est la question

David Lemelin présente sa chronique Droit de citéDavid Lemelin (Photo : Archives Carrefour de Québec)

La question se pose en effet : est-ce vraiment pertinent pour Bruno Marchand d’aller se faire prendre en photo au Danemark et en Finlande pour observer et s’inspirer des meilleures pratiques en matière de mobilité?

Par David Lemelin

Je l’ai déjà écrit : c’est pas lui qui va s’inspirer pour vrai. C’est pas lui l’expert, loin de là. Lui, il va faire ses larges sourires, des coucous à la caméra et se donner l’air de se rendre utile. Or, sur le plan technique et pratique, l’utilité de sa présence avoisinera le zéro absolu.

La cheffe de Transition Québec, Jackie Smith, et moi disons la même affaire, en somme : ce n’est pas un voyage qui changera les choses. Les vrais experts savent déjà, s’inspirent déjà les uns des autres et c’est pas le maire qui va concevoir les plans de ce qui sera réalisé. Ce sont les gens qualifiés qui le feront.

Résultat : à part émettre des GES (douce ironie), on ne voit pas trop à quoi ça doit servir. 

Alors, pourquoi?

En politique, il y a néanmoins une variable un peu intangible et c’est celle de la stature politique. Ce concept peut inclure des éléments tels que la crédibilité, la notoriété… bref, c’est ce qui sculpte, pour résumer, « l’image de marque » d’un élu.

Et, bien souvent, l’action politique menée à l’internationale peut être payante pour construire une image de marque positive. Les chefs d’État se promènent beaucoup et ce n’est pas toujours inutile, il est vrai.

Certes, nouer des liens, ça se peut se faire à distance, mais c’est un peu froid et facile de dire à quelqu’un qu’on tient à nos échanges et notre relation tout en restant chez soi dans son fauteuil, les pieds sur le pouf.

Ce n’est pas comme ça que ça se fait, les experts en relations internationales vous le diront. Ne faire aucun effort pour nouer des liens (c’est-à-dire ne pas dépenser un sou) est mal vu, à l’international.

Dans le cabinet de Marchand, il y a des péquistes qui ont goûté au gouvernement. Ils ont donc tendance à importer à la mairie ce qu’ils ont vécu à l’Assemblée nationale. Ça peut fonctionner à merveille.

Mais, il reste qu’à Québec, depuis toujours, il y a une tendance à se méfier des dépenses faites à l’internationale par une mairie en quête d’amis. Jean-Paul L’Allier, par exemple, y a goûté méchamment. Faut dire qu’il se tapait André Arthur au quotidien… une époque radiophonique pas mal plus impitoyable qu’aujourd’hui.

Régis Labeaume était, quant à lui, un amateur des voyages qui servent à s’inspirer sans réfléchir de ce qui se fait chez le voisin. C’est aussi un modèle qui nuit à la justification des voyages d’une mairie de Québec. Ça rend tous les prochains voyages suspects. C’est exactement ce qui se passe avec Marchand.

Pour ma part, je pense que c’est essentiel de nourrir le rayonnement international de Québec en se déplaçant à l’étranger. Ça ne fait pas sérieux, autrement. Et si les relations internationales étaient parfaitement inutiles, personne n’en ferait.

Dans ce cas-ci, le problème est ailleurs : il repart à l’étranger pour apprendre sur la mobilité. Conséquence? Ça renforce l’impression qu’il ne connait pas ça, la mobilité. Or, le maire devrait guider, inspirer, indiquer la voie. Lui, il va à l’école, à l’étranger, se faire dire comment faire. C’est cet aspect précis qui pose problème.

C’est d’autant plus problématique que l’on pourrait s’attendre à ce que sa véritable priorité – voire obsession – soit la mise sur rail du tramway. Or, on apprend que le chantier, qui devait être lancé cet été, sera retardé.

C’est ça qui ne marche pas. Il y a plus urgent que les photos de touriste.

Or, le « Capitaine tramway » ne connait pas ça. Ou, en tout cas, nourrit l’impression d’un peewee qui va à l’étranger suivre des cours de patin, alors qu’on a besoin de quelqu’un du calibre de la Ligue nationale pour porter ce vaste projet de transport collectif.

Bref, en principe, aller à l’étranger, ça peut être une bonne idée. Et s’il était prévu qu’il y aille surtout pour nouer des liens, on serait sans doute moins sévère. Or, le temps file. Les soumissionnaires se défilent et les prix s’emballent.

Dès lors, on n’en est plus à l’étape des cours de patin. La glace craque… il faut agir.

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