Tout le monde y trouve son compte

MarchandLe maire de Québec, Bruno Marchand. Photo : Simon Bélanger

Le spectacle de la « collision » entre les maires et le gouvernement de François Legault fut certes divertissant, mais il n’aura vraisemblablement qu’un impact relatif sur la suite des choses. 

Par Gabriel Côté

En faisant front commun pour demander au gouvernement pour octroyer plus de financement aux municipalités et pour limiter l’étalement urbain, les maires des villes du Québec ont fait ce qu’ils devaient faire dans le contexte d’une année électorale. Ils ont uni leurs voix pour défendre des intérêts communs, en espérant ainsi mettre plus de pression sur le gouvernement qui doit passer le test de l’urne à l’automne. 

Le raisonnement derrière cette conduite est fort simple : en faisant ces demandes à quelques mois du scrutin, les maires disent au premier ministre qu’il a le choix ou bien de répondre positivement aux revendications des villes, ou bien d’avoir leurs représentants dans les pattes jusqu’au vote.

Même s’il s’agit de la meilleure stratégie possible, c’est presque un coup d’épée dans l’eau dans le contexte actuel, vu la popularité dont jouit le gouvernement. Presque. 

Sans porter de jugement sur les arguments de part et d’autre à propos de la densification, il est manifeste que c’est, d’un point de vue strictement politique, un enjeu assez complexe. Comme c’est coutume de le faire, on peut le simplifier en l’inscrivant dans l’opposition entre les grands centres et les régions. 

Le premier ministre du Québec, François Legault.
Photo : Simon Bélanger

Le calcul que semble faire la CAQ s’appuie précisément sur cette idée. En faisant la promotion de la densification, le gouvernement risquerait de s’antagoniser une partie non-négligeable de l’électorat en dehors des grandes villes. Qui plus est, dans le contexte actuel, la CAQ n’a pas besoin de faire des gains à Montréal ou au centre-ville de Québec pour se maintenir au pouvoir.

Ainsi, comme il n’est pas contraint à le faire, le gouvernement n’a rien à gagner à s’engager à répondre favorablement aux revendications des maires. S’il donnait sa parole et en venait à se dédire plus tard, on l’accuserait d’avoir menti. En ne garantissant rien, le gouvernement Legault se laisse plus de marge de manœuvre et il ménage son rapport de force d’une façon qui lui est favorable. 

En provoquant une opposition à propos de l’étalement urbain et de la densification, il se peut donc que les représentants des villes contribuent à mobiliser l’électorat de la CAQ, et qu’ils donnent l’occasion au gouvernement d’améliorer son positionnement au plan politique, au sens large. 

Toutefois, tout ceci ne signifie pas que les maires n’auraient pas dû agir comme ils l’ont fait, ni qu’ils ne peuvent rien gagner rien dans tout ce chamaillage. On peut d’ailleurs présumer qu’ils sont au courant du contexte, et qu’ils n’avaient pas trop d’espoir de faire « plier » le gouvernement cette semaine. 

D’une part, c’est qu’il n’est jamais mauvais d’avoir des revendications communes. Et d’autre part, le fait de mettre de la pression crée la possibilité d’une erreur de la part du gouvernement, dont les ministres n’ont pas toujours fait preuve de prudence au cours des derniers mois. Si l’un d’eux glissait, ce qui est loin d’être impossible, les villes auraient peut-être l’occasion de rétablir un peu leur rapport de force.

Enfin, le discours sur l’autonomie des villes est rarement impopulaire. Pour cette raison les maires tireront probablement un profit politique de l’exercice qui s’est joué cette semaine. 

À la vitesse où vont les choses, il est trop tôt pour déclarer un match nul. Mais on peut déjà voir que tout le monde y trouve son compte d’une certaine manière. 

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