Le regard qui fuit

Quoi qu'on dise par Martin ClaveauMartin Claveau (Photo : archives Carrefour de Québec)

Je croise beaucoup de monde lors de mes promenades quotidiennes depuis le début du confinement. J’essaye de demeurer actif et d’accomplir mes 10 000 pas par jour. Comme j’ai toujours adoré marcher, pour moi, ce n’est pas trop difficile. Souvent, ma blonde et notre fille m’accompagne, mais parfois je pars tout seul.

Ce que je trouve plutôt « weird » quand je marche, c’est que la plupart des gens que je croise évitent de me regarder. Beaucoup sont des gens que je ne connais pas, alors c’est normal, j’imagine.

Ce qui surprend toutefois, c’est de voir à quel point des gens, que je connais ou que je côtoie, détournent le regard. Plusieurs ont ce petit réflexe, facilement observable, de faire semblant de ne pas me voir et de continuer leur chemin.

Ces gens ne sont pas mes amis bien sûr, car on en a bien peu dans la vie. Ce sont ces gens qui habitent ou qui travaillent dans le même coin que moi. Ce sont des voisins, des gens que je croise à l’école Saint-Fidèle ou chez IGA Jobidon. Par exemple, cette mère de trois enfants, avec qui je discute occasionnellement à l’école et qui détourne maintenant le regard quand elle nous aperçoit sur un coin de rue. Ce père d’une amie de ma fille, qui fait semblant de ne pas nous voir en faisant son jogging. Cette coiffeuse qui change de côté de rue, quand elle nous repère de loin et qui fixe le sol en passant de l’autre côté de la rue. Il y en a des dizaines comme ça. La plupart du temps, je cherche leurs regards, mais je ne les trouve jamais, ils fuient comme s’ils avaient honte ou peur de je ne sais quoi…

En temps normal, ce sont des gens avec qui j’échange de très simples salutations. Nos conversations sont généralement brèves, quand il y en a, mais là, c’est l’évitement total. Je trouve ça un peu déprimant moi, ce genre de chacun pour soi collectif, mais il n’y a pas grand-chose que je peux faire, à part continuer à les chercher du regard.

Cela dit, pour certains, c’est tout le contraire et la pandémie les rend soudainement plus attentifs à leur entourage. Mon troisième voisin ne m’avait jamais, ne serait-ce que regardé, depuis 10 ans. Voilà qu’il s’est mis à me saluer et à m’adresser la parole à chaque fois que je passe. Le gars m’a même demandé le plus sérieusement du monde à ma fille et moi, si nous venions d’emménager…

Je dis toujours que certaines choses très simples de la vie nous révèlent les gens sous leur vrai jour. Le rapport que d’aucuns entretiennent avec l’argent en est un. La boisson révèle souvent des facettes inconnues des personnalités de certains, de même que la façon dont ils pratiquent certains sports. Je crois que je devrais maintenant ajouter les pandémies à ces choses toutes simples qui me font mieux connaître mes semblables.

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