L’âme de la ville

L'âme de la ville

On aura à célébrer sous peu un bien triste anniversaire. 

Collaboration spéciale, Georges-Albert Beaudry

Le 16 avril 1918 mourait celui qui à ce jour est encore considéré par plusieurs comme étant peut-être le meilleur de nos journalistes. 

Le regard lucide et l’esprit clair, il a compris mieux qu’aucun autre la plupart des problèmes de son temps. Mais sa force tenait à vrai dire moins à ses idées en elles-mêmes qu’à sa manière de les exprimer. La simplicité et en même temps la précision de son style ont donné à ses textes quelque chose d’intemporel, si bien qu’on peut lire ce qu’étaient au départ des articles de circonstance comme de petits mais très honnêtes essais.   

Toutes ces belles qualités n’ont pas empêché Jules Fournier de tenir des propos scandaleux à propos de Québec dans un texte intitulé Nos amis les Québecquois (c’est avec cet orthographe qu’on désignait autrefois les citoyens de la vieille capitale).

Nous sommes au printemps 1913. Fournier rapporte un fait divers qui semble aujourd’hui de peu d’importance. 

Un groupe de Québec pour la défense du français a refusé un peu sèchement de prendre part à une réunion organisée par l’Association Saint-Jean-Baptiste de Montréal. Or, deux ans plus tôt, les montréalais s’étaient mis à la disposition des gens de Québec qui arrangeaient alors un semblable événement.

Il n’en fallait pas plus au journaliste pour tirer hâtivement des conclusions sur le caractère des habitants de la ville de Québec.

Pour s’étonner de leur refus, écrivait-il, « il faudrait ne pas connaître Québec. Il faudrait ignorer le trait de caractère qui, avec l’amour de l’encroûtement et la vanité bouffonne, fait le fond même de l’âme québecquoise : c’est à savoir une défiance irréductible de tout ce qui n’est pas de Québec, compliquée à l’égard de Montréal, d’une jalousie féroce et sournoise de parent pauvre. »

Allez savoir! Tout cela était peut-être vrai au début du siècle dernier. Ce ne l’est manifestement plus aujourd’hui.

En 1913, Québec faisait en effet preuve d’une certaine vanité bouffonne. Imaginez! On se targuait alors d’être une « ville unique sur ce continent ».

On était alors fiers de notre port, que l’on savait l’un des plus beaux du monde, mais on se tenait dans la paresse et le laisser-aller. On refusait à cette époque les entreprises nouvelles, on lorgnait d’un œil sévère ceux qui exprimaient le souhait de développer la ville et de réaliser des projets. 

Si l’on nous faisait des reproches, on avait d’avance des réponses toutes faites. 

Si les choses ne se faisaient pas, c’était que des compagnies nous persécutaient, ou encore que le gouvernement provincial plaçait ses propres intérêts politiques avant ceux de la Ville.   

***

On apprenait vendredi dernier que des « déblocages majeurs » avaient eu lieu dans les discussions entre la Ville et le gouvernement du Québec concernant l’affaire du tramway. Lundi en fin de journée, on nous disait qu’une entente aura lieu d’ici à mercredi.

Chez plusieurs, la nouvelle est accueillie avec un enthousiasme immodéré. D’autres dénoncent les modifications du projet avec une impressionnante virulence.

C’est comme si les tergiversations des derniers mois (ou des dernières années?) les avaient fait douter des capacités de L’accent d’Amérique à mener des projets à termes, ou même simplement à se développer un peu. 

Les choses ont bien changé.

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