On parle de racisme et de l’héritage afro-américain avec l’artiste Webster

WebsterLe Mois de l'histoire des noirs est encore et surtout important aujourd'hui. (Photo : Philipe Ruel)

Limoilou – Dans le cadre du Mois de l’histoire des noirs, nous nous sommes entretenus avec Aly Ndiaye, alias Webster, afin de discuter de l’enjeu de racisme qui est encore présent aujourd’hui et de ce que la culture québécoise a hérité de la culture afro-américaine.

Par Mélissa Gaudreault

D’origine sénégalaise-québécoise, Webster est un artiste hip hop (rappeur) depuis 1995 et anime des conférences sur l’histoire afro-québécoise et afro-canadienne (ex. : esclavage, la période après l’esclavage, le mouvement afro-américain, racisme systémique, etc.).

Le Mois de l’histoire des noirs est selon lui une célébration importante, car « c’est une histoire dont on ne parle pas au Québec ni au Canada. Le Mois de l’histoire des noirs est important au moins pour que pendant un mois on mette l’accent sur cette histoire-là. »

Si l’on s’attarde sur le terme « noir », « les gens ne s’entendent pas sur l’usage du terme « noir ». Il peut être décliné de différentes manières comme « afro », qui est une manière de localiser l’expérience noire dans les Amériques. C’est un terme qui vieillit ; avant ça, il y a d’autres termes qui étaient utilisés qui sont passés date et il ne cesse d’évoluer. C’est correct d’appeler ça le Mois de l’histoire des noirs. Je ne vois pas de problème avec ça. Il y a d’autres appellations encore plus précises qui permettent de situer cette expérience-là. Le terme « noir » n’est pas péjoratif. On utilise une couleur pour désigner une expérience humaine qui finalement est de tous les tons de couleur de peau. » – Webster

Il explique néanmoins qu’il y a une différence quand c’est une personne afro-américaine vers quand c’est une personne non-afro-américaine qui parle de racisme, parce que cette dernière ne vit pas le racisme donc elle peut théoriser l’enjeu sans réellement le comprendre.

Le racisme

L’artiste et conférencier a déjà vécu du racisme et en vit encore aujourd’hui sous différentes formes : racisme individuel, racisme d’État, racisme aux mains de la police de Québec, racisme aux mains d’individus, etc.

« C’est quelque chose qui fait partie de l’expérience noire en Occident. J’ai reçu des insultes, j’ai vécu du profilage racial par la police, je me fais suivre dans les magasins, j’ai perdu des opportunités d’emploi. » – Webster

La société a ainsi encore du chemin à faire pour devenir plus égalitaire et juste, ce qui passe par plusieurs étapes.

Ce qu’il reste surtout à faire, c’est « d’être capable de nommer le racisme systémique ; on a un gouvernement qui refuse de nommer cette dynamique-là. En refusant de la nommer, on ne peut pas s’y attaquer, on ne peut pas travailler pour une société meilleure parce qu’on n’arrive même pas à mettre des mots sur ce mal-là. Il faut comprendre que ça fait partie de notre histoire. Une refonte du système judiciaire est nécessaire parce qu’il y a beaucoup de personnes racisées qui sont judiciarisées. Plusieurs personnes racisées n’ont pas accès à certains emplois », explique-t-il.

La situation s’est quand même améliorée dans les dernières années, car on a plus conscience du racisme et on le comprend mieux, notamment parce que l’on en parle plus dans les médias et dans les écoles en utilisant l’approche intersectionnelle pour expliquer les dynamiques de pouvoir et les différentes formes de discrimination.

L’héritage afro-américain

Comme mentionné plus tôt, la culture québécoise doit beaucoup à la culture afro-américaine. On peut prendre l’exemple du hip hop, qui est né comme on le sait dans la communauté afro-américaine à New York, qui est maintenant une discipline pratiquée par tous. On peut se demander si le hip hop n’a pas été victime d’appropriation culturelle à un certain niveau. Voici ce que Webster avait à dire à ce sujet :

« Le hip hop parle à tout le monde sur la planète. Je pense que tout le monde peut faire du rap. Tout le monde peut se l’approprier. Toutefois, la dynamique particulière dans laquelle on se trouve au Québec c’est qu’on sait d’où vient le hip hop, comment il est né, mais aujourd’hui on ne retrouve plus de rappeurs noirs à la télé ou dans nos radios ce qui est intimement lié à la notion de racisme systémique. »

Outre-le hip hop, le Québec et même le monde entier a pu bénéficier de réflexions et de recherches comme celle que l’on retrouve dans Le Contrat racial de Charles Mills (1997), qui expose que le monde moderne a été fondé sur la notion que le « blanc » était supérieur au « non-blanc », récemment traduit par Webster lui-même qui souhaitait rendre l’œuvre accessible à tous. Ce dernier fera un lancement pour le livre le 17 février prochain ici même à Québec.

Plusieurs personnalités, que l’artiste-conférencier admire beaucoup, ont également contribué à la lutte contre le racisme et à célébrer la culture afro-américaine, telles que Malcom X, Alexander Grant, Dominique Fils-Aimée, Valérie Pio.

Fait intéressant pour ceux qui ne le savait pas, Webster est le frère de Mariem, que nous connaissons comme animatrice de plusieurs émissions québécoises.

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