Campagne électorale : le petit bilan hebdomadaire (II)

Pancarte électorale vandalisée sur la rue Saint-Jean dans le Vieux-QuébecPancarte électorale vandalisée sur la rue Saint-Jean dans le Vieux-Québec. Crédit photo : Sophie Williamson.

Derrière les nouvelles promesses de cette première semaine de campagne, c’est une certaine lassitude qui semblait se dissimuler derrière les annonces enthousiastes des chefs.

Cette lassitude a certainement de multiples causes. Nommons seulement la caricature de The Gazette qui a insurgé Paul St-Pierre Plamondon, les embûches qui s’abattent sur Dominique Anglade ou le malaise pour Gabriel Nadeau-Dubois de s’inscrire en continuité avec René Lévesque.

Sans hésiter, ce qui a fait le plus parler cette semaine sont les menaces proférées à l’endroit de certains candidats. La lourdeur qu’elles impliquent n’a pas manqué de s’insérer dans les débats.

En plus de s’adonner à la pratique de l’art oratoire, les chefs ont dû s’occuper de sentiments de crainte, penser à des solutions, renforcer la sécurité autour d’eux et de leurs équipes. Ils se sont peut-être aussi adonnés à réfléchir aux causes, au pourquoi, et ont cherché des coupables.

Il ne faut toutefois pas penser que l’ambiance n’est que lourde ou insoutenable sur le terrain. Pensons à François Legault qui s’est improvisé caissier au casse-croûte Ti-Oui à Saint-Raymond ce jeudi. La campagne électorale a certes son lot de petites joies.

Une impuissance morale

Peut-on encore avoir espoir en notre démocratie québécoise si le peuple se laisse dominer par des passions mauvaises comme la haine et la colère ?

On peut certes défendre que ce sont des cas isolés, marginaux, extrêmes. Il reste que c’est la première fois que cette « marginalité » s’exprime.

Ces évènements semblent révéler une certaine impuissance morale de nos politiciens. Comment peuvent-ils s’assurer que le bien reste la norme ? Peut-être devraient-ils avouer, quelquefois, leur incompréhension et leur ignorance. Peut-être devrait-il faire comme Véronique Hivon et « sonder davantage leur âme ».

C’est possiblement cette même perte d’énergie vitale qui grandit chez les citoyens. Il s’agit peut-être d’une exacerbation de l’impression que le débat, la discussion, la réflexion en commun, sont rendus impossibles par la difficulté des questions, la grandeur des problèmes et l’incapacité de nos gouvernements de les prendre en charge.

Une fatigue politique

On parle constamment de la radicalisation et de la polarisation des opinions. Il semble plutôt qu’il règne en-deçà des divergences un sentiment unique et partagé ; celui de la fatigue politique. La polarisation se joue plutôt entre ceux qui sont au bout de leur rouleau de patience et ceux qui se laissent bercer dans l’indifférence ; deux symptômes d’une même fatigue.

Sans donner raison à la colère qui sévit (s’attaquer personnellement à une personnalité politique est un acte puéril), on peut essayer de la comprendre. L’échange civilisé des points de vue paraissant inutile, le fait d’une autre époque, les citoyens demeurent avec leurs insatisfactions, sans réel courage ni prise sur le monde.

Nous prenons conscience que nous sommes de simples témoins de la politique qui se déroule sans nous, constat qui n’exclue point le gouvernement lui-même.

Il semble que ce soit ce sentiment d’une impuissance totale que la pandémie a révélé. Ce qui révolte, ce n’est peut-être pas tant l’impression de servitude, de la perte de ses libertés individuelles ou de ses droits, mais celui de la difficulté de se gouverner comme peuple.

Nous assistons peut-être aux premières conséquences de l’engourdissement de notre liberté commune, proprement politique, qui s’étiole sans qu’on en voit l’achèvement. 

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