Découvrir l’archéologie à l’Îlot des palais

Francine SaillantFrancine Saillant. Photo : Francine Saillant

Dans le cadre du mois de l’archéologie qui se déroulera durant tout le mois d’août, Francine Saillant, professeure en anthropologie à l’Université Laval, a conçu une installation évolutive qui joint art contemporain et archéologie. Elle a confectionnée plus de 1000 figurines d’argiles de visages modelés qui évoquent des objets de collections archéologiques.

Nous nous sommes donc entretenus avec la professeure nouvellement médaillée d’or 2020 de la recherche en sciences humaines et sociales (CRSH) pour en apprendre plus sur l’archéologie.

D’où vient votre intérêt pour l’archéologie?

« L’archéologie fait partie de la vie de tout anthropologue, mais personnellement, j’ai eu la chance de côtoyer des archéologues et de m’intéresser à leurs travaux. Je trouve leur vision de la vie, des sociétés et des cultures extraordinaire avec leur manière de s’intéresser au très long passé. La diversité des cultures, c’est aussi les cultures qui nous ont précédées et qu’on essaie de comprendre. L’archéologie comme mode d’interrogation m’a toujours interpellée.

Nous prenons aujourd’hui conscience de la fragilité de nos sociétés. On se demande plus que jamais ce qui restera de nous. Sans être trop obsédée par cette affaire, je me suis rapprochée des archéologues. L’archéologie est une excellente manière de regarder dans le présent pour comprendre le passé. C’est très différent de l’histoire, parce que ça nous amène à interroger le passé par l’objet, les traces, les restes. Plus on creuse, plus on découvre des couches de vie. C’est formidable de se dire que les évidences ne sont ni devant moi, ni en dessous de moi. » 

Pourquoi faire un mois complet consacré à l’archéologie?

« La beauté du mois de l’archéologie c’est la démocratisation. J’aime beaucoup les disciplines qui mettent en valeur le savoir et qui permettent à des gens qui n’ont pas fait d’études ou ont étudiés autre chose de s’approcher de la manière anthropologique d’interroger le réel. Quelle était la vie au XVIIe siècle au Québec, qu’est-ce que les gens mangeaient, qu’est-ce qu’ils faisaient, que nous reste-t-il d’eux, sont des questions fascinantes.

Je pense que la majorité des gens ont une certaine curiosité. Pourquoi ne pas s’intéresser à ce qui se passe ici à l’Îlot des palais et aux sites qu’on nous propose d’archéologie à Québec ? » 

Pourquoi l’évènement peut intéresser les enfants? 

« Quand j’étais jeune, je voulais savoir c’était quoi les hommes avant. J’ai eu accès à des livres grâce à une bibliothécaire extraordinaire. J’ai vu pour la première fois des hommes préhistoriques et je trouvais ça aussi beau qu’un livre de contes qu’on raconte aux enfants. Le mois de l’archéologie permet de faire découvrir aux enfants, à l’aide de formats adaptés, ce qui les entourent. »

Parlez-nous de votre exposition, archéopoétique. 

« J’étais fasciné par les figurines qu’on voit dans les musées d’archéologie au Caire ou au Louvre, par la beauté des miniatures. Je me suis mise à en fabriquer et à méditer sur le présent et l’avenir. Au printemps, j’ai pu faire un séjour à l’intérieur des laboratoires d’archéologie à l’Université Laval et de continuer mon travail autour de ce que j’ai appelé une table d’archéopoétique.

Il s’agit d’un acte artistique où je présente de manière artistique des objets familiers qu’on retrouve dans les laboratoires d’archéologie. J’ai commencé à créer ainsi une fausse collection dans l’idée de présenter de manière poétique, sensible et sympathique ces objets.

J’ai découvert qu’il y avait trois figurines égyptiennes à l’Îlot des palais qui datent de 600 ans avant Jésus Christ. Elles ont été retrouvées dans le sous-sol de la ville de Québec au XIXe siècle. C’est une histoire incroyable ! 

J’étais en contact avec Camille Courier, artiste des beaux-arts de Paris qui a commencé en faisant du dessin égyptologique dans les temples de Karnak. On a décidé de travailler ensemble et j’ai choisi d’ajouter une reproduction des trois figurines et Camille en a fait un dessin. Une photographe, Madeleine Martin, a aussi fait des photos d’autres figurines, ce qui ajoute une autre dimension. Il y a aussi une personne qui a fait un soundscape archéologique, Alexandrine Boudreault-Fournier. 

Pour résumer, archéopoétique est une évocation qui se veut immersive. C’est une manière sensible et différente d’aborder l’archéologie et l’art. C’est la phase I de ce travail. Il faudra suivre l’évolution pour voir les autres phases. Nous avons plein de projets. » 

Quelle est l’apport de l’archéologie en vue d’une meilleure compréhension de l’humain? 

« Prenons le cas des épidémies. Nous savons aujourd’hui que les autochtones n’avaient pratiquement pas de cancer, mais qu’ils souffraient beaucoup d’arthrite. On le sait parce que les archéologues sont capables de détecter les signes sur les restes humains. On a été capable de retracer des informations sur des maladies qu’avait l’homme Neandertal. C’est un exemple pour répondre à votre question.

Cela dit, on aura toujours besoin d’interroger le passé. On comprend le présent à la lumière du passé. Questionner, ça fait partie de la nature humaine. » 

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