Faire le lien

David LemelinDavid Lemelin (Photo : Archives Carrefour de Québec)

On attendait des bouchons gigantesques qui iraient de Lévis jusqu’à Rimouski. On anticipait une congestion telle qu’on y resterait pendant 29 heures, sans bouger. On se voyait déjà creuser le troisième lien à la hâte, avec une pelle bleue.

Rien de tout cela ne s’est produit. Oui, c’est parfois lourd, mais rien à voir avec l’apocalypse annoncée. 

Rassurez-vous, personne ne pense que c’était prévisible ni normal. En principe, quand ne subsistent que deux voies sur six, c’est effectivement l’enfer routier qui nous pend au bout du pare-chocs.

Or, il s’est passé quelque chose de spectaculaire : à la suite des messages du ministère des Transports et autres acteurs politiques… les gens ont changé leurs habitudes!

Ainsi, l’exemple du pont Laporte illustre à merveille ce que peut faire une réorganisation des horaires, des habitudes. Évidemment, les facteurs qui expliquent la fluidité automobile sont nombreux : des gens en vacances, certains encore en télétravail, des gens qui partent plus tôt, d’autres qui dorment sur la rive-nord, des horaires modifiés au travail, etc. Etc.

Du reste, il nous faut, à la lumière de tout cela, réfléchir à ce que disent les experts depuis longtemps : la congestion se règlera par de multiples moyens et non pas par un troisième lien qui, en ajoutant des voies, augmentera l’intensité des problèmes. 

C’est tout. C’est clair. Et c’est possible, on le voit bien. 

La congestion monstre ne sert pas davantage d’argument pour le troisième lien, surtout lorsqu’il s’agit de difficultés temporaires. Des travaux sur le pont, on ne voit pas ça 365 jours par année. Alors, gaspiller 10 milliards et plus pour quelques jours de bordel, c’est démesuré, tant sur le plan comptable qu’urbanistique.

Les liens fluviaux ont besoin d’amour, tout comme bien des sections des routes déjà existantes, sans oublier les ponts eux-mêmes. Bref, il y a suffisamment de défis pour ne pas en rajouter inutilement. On peut déjà faire beaucoup mieux en se donnant plutôt les moyens de connecter adéquatement les deux rives par le transport en commun, par exemple.

Il est fort possible que, constatant l’étonnante fluidité sur le pont, les automobilistes reprennent rapidement leurs habitudes et que la deuxième période de travaux devienne un cauchemar. Ça n’enlèvera cependant rien à la démonstration éloquente qui aura été faite : en réorganisant nos flûtes, on peut respirer plus aisément sur nos routes. C’est ce que nous disent les experts lorsqu’ils insistent sur le fait qu’à Québec, le volume autoroutier n’est pas si pire qu’on le croit. Sur 35 agglomérations canadiennes, Québec se classe au 30e rang lorsqu’on évalue la congestion.  

En somme, l’argument qui semblait un peu théorique devient tout à coup des plus intéressants et concret : il faut travailler sur de multiples facteurs pour corriger la situation, incluant l’indispensable virage vers un transport collectif plus conséquent. 

Encore faut-il, pour prendre des décisions politiques éclairées, faire les bons liens entre les éléments…

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