Mes demandes pour la campagne électorale

Hôtel de Ville de QuébecPhoto: Pierre-Olivier Fortin

Permettez-moi d’abord de m’excuser de faire irruption dans une conversation à laquelle je ne suis pas invité. Et vraiment, je n’en ai pas le goût ni l’envie, d’autant plus que je sais bien que les avis des chroniqueurs du Carrefour n’intéressent que bien peu de monde.

Par Georges-Albert Beaudry

Il se trouve des gens qui raffolent des campagnes électorales, et même des campagnes municipales. C’est pour dire. Ils trouvent une sorte de plaisir à commenter les « stratégies » des différents partis; ils considèrent qu’il s’agit d’un exercice sain en démocratie, et ils soutiennent qu’une campagne permet « d’échanger des idées » et de « réfléchir à ce que devrait être la ville ».

Quant à moi, j’ai surtout l’impression de me faire niaiser. Les points de presse sont d’un ennui incomparable. Tous ceux qui prennent la parole craignent tellement de faire un faux pas qu’ils se contentent de répéter un message convenu d’avance, parfois sans même en modifier la formule. Je vois bien des sourires crispés, des clins d’œil complices dont je ne connais pas le secret, et des lieux communs dont le sens m’échappe tout à fait. Mais des « stratégies » et des « échanges d’idées », allez savoir! Je n’en serais pas même conscient si je ne comptais parmi mes connaissances de rigoureux politologues.

Quand on me parle de ville « transparente », « résiliente », « intelligente », « verte », ou encore qu’on me bat les oreilles avec des questions d’urbanisme et d’aménagement du territoire dans un langage de pseudo-spécialiste fait pour m’étourdir, j’arrête de suivre, j’ai l’impression d’assister à des présentations destinées à des fonctionnaires. Laissez-moi tranquille avec votre jargon prétentieux, et parlez-moi comme au premier venu. Il y a deux façons de prendre les gens pour des caves : ou bien on leur parle comme à des enfants et on leur cache des choses « pour leur bien », ou bien on emploie des mots inutilement compliqués en se disant que de toute façon, personne n’osera poser de questions pour éclaircir ces expressions approximatives, fourre-tout, et qui puent la stratégie de comm.

Une campagne électorale ne devrait pas avoir l’air d’un colloque d’étudiants à la maîtrise en administration publique.

Une fois les grands principes exposés – chacun, semble-t-il, a sa propre « vision » de la ville – on nous présente généralement un « programme », c’est-à-dire une série d’engagements et de promesses. À ce qu’on dit, c’est en prenant connaissance de la « plateforme » de chacun des partis que nous devrions déterminer à qui ira notre vote.

À ce propos, il me semble toujours qu’on nous promet monts et marée. Chaque formation politique a ses propres visions de grandeur, ses propres projets d’envergure, et j’ai parfois l’impression qu’on me somme de choisir entre le plus ambitieux d’entre tous, comme si l’ambition était une qualité nécessaire pour diriger une ville. Je connais des gens qui ont beaucoup d’ambition, et ils me semblent plus portés que les autres à tourner les coins ronds. C’est pourquoi en politique je me méfie de cette « qualité » comme de la peste.

Ainsi j’ai pour règle personnelle de toujours appuyer le candidat qui a le moins d’idées et qui promet le moins. J’appuierais sans hésiter l’homme ou la femme qui se présenterait à moi en disant : « Je n’ai rien à offrir à cette ville, sinon ma bonne volonté. Je ne sais pas comment améliorer l’état des choses, mais je me propose – et c’est déjà beaucoup – de simplement limiter les dégâts, rien de plus. Si un problème se présente, je ferai mon possible pour le régler et surtout pour ne pas empirer la situation. Au reste, je laisserai un peu les choses aller. Elles n’ont pas besoin que j’y mette la main pour suivre leur cours. Cela suffira, je l’espère, à préserver l’ordre et la tranquillité sur notre territoire. »

L’échec est presque impossible pour celui qui propose si peu.

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