La compagnie française Les Chiens de Navarre débarque au Diamant pour trois jours avec La vie est une fête. Un spectacle qui refuse toute bienséance. Chaos, folie et humour noir s’y enchaînent dans un tourbillon qui met la société contemporaine en pièces. Grinçant, scatologique, sexuel, mais aussi tendre, le théâtre de Jean-Christophe Meurisse agit comme un miroir déformant… et pourtant terriblement juste.
Avant même que la pièce ne commence, le public est propulsé au centre de l’Assemblée nationale française. Débat sur la retraite, pétitions absurdes, poésie gérontophile : une diarrhée verbale qui tourne au comique. La satire colle à l’actualité, jusqu’à évoquer la condamnation de Nicolas Sarkozy le soir même, preuve d’une grande réactivité de la troupe.
Urgences psychiatriques, miroir social
L’action se déroule dans un service d’urgence psychiatrique délabré. Métaphore d’une société en déliquescence, mais aussi « sas d’humanité » où se dévoilent les zones de vulnérabilité. On y croise une femme dépressive obsédée par Christophe, un cadre licencié par des start-uppers cyniques, une quadragénaire suicidaire entre les mains d’une gynéco garagiste ou d’une chirurgienne esthétique impitoyable. Les personnages reviennent, dévoilant des vies broyées.
De la France au Québec
Très ancré dans la société française, le spectacle prend soin d’ajouter des clins d’œil locaux : Wendake, le Centre Vidéotron, ou encore une annexion grinçante du Canada rebaptisé… USB. Si les Français rient plus fort de certaines blagues, les thèmes traversent l’Atlantique : fracture entre générations, folie sociale, besoin de consolation dans un monde violent. L’outrance est universelle, et l’humour noir passe très bien la rampe à Québec.
Outrance et tendresse
La vie est une fête déborde de partout. Cru, scatologique, sexuel, sanguinolent. L’humanité y est exposée dans tous ses fluides, sans filtre. Et la scène envahit littéralement la salle : hémicycle, couloir de patient en crise, pavés d’une révolte urbaine. Impossible de rester passif. Le public est happé, invité à lâcher son fou. Mais il ne faudrait pas voir dans cette pièce une simple suite de grossièretés. La vie est une fête dégage une véritable tendresse. Derrière la satire politique, jubilatoirement anti-institutions, se glisse une attention sincère aux failles intimes. Les saynètes dynamitent nos sociétés modernes, mais rappellent aussi la fragilité des individus qui les composent. La vie est une fête est cru, sauvage, jubilatoire. On en sort grisé, étourdi, secoué. Un théâtre sans tabou, à éviter pour les mineurs, mais à savourer pour sa liberté et sa décadence. Et si tout doit finir, autant que ce soit dans une fête.
La vie est une fête, au Diamant du 25 au 27 septembre 2025.
Commentez sur "La vie est une fête : un chaos jubilatoire au Diamant"