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Claude Villeneuve

« C’est anti-démocratique » : Un projet de logements sociaux dérange à Saint-Sauveur

Crédit : Ville de Québec
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CKRL

(Saint-Sauveur) Le projet porté par la Société John Howard est critiqué par plusieurs citoyens qui dénoncent le processus d’approbation du règlement autorisant la construction, qui se fera sans consultation citoyenne.

Xavier Renald

Le projet en question vise à offrir 23 chambres pour des personnes judiciarisées dont le processus de réinsertion est terminé. Le terrain choisi est situé au 360, rue du Cardinal-Taschereau. Mené par la Société John Howard du Québec, ce projet sera autorisé par la Ville de Québec sans qu’il y ait de consultation publique ou de référendum. Cette méthode a été vivement critiquée par plusieurs citoyens préoccupés qui se sont présentés au conseil de quartier du 18 juin.

La Ville se doit d’agir

Selon Marc De Koninck, conseiller stratégique en habitation et développement social pour la Ville de Québec, « la Ville a l’obligation d’agir pour répondre aux besoins de logement de toutes sortes de segments de la population, y compris les personnes judiciarisées ». Il indique que malgré le soutien populaire aux projets de logements sociaux, lorsqu’un cas spécifique est évoqué, le capital de sympathie envers les projets diminue fortement. « Lorsque présentés en référendum, [ces projets] sont systématiquement rejetés », ajoute-t-il, justifiant le choix de la Ville de procéder de cette manière.

« Ce n’est pas parce qu’on développe des services dans le secteur qu’on amène les problèmes dans un secteur. On développe ces services parce que cette réalité existe déjà dans le secteur. » – Marc De Koninck

L’adoption du projet de réglementation a eu lieu le 4 juin dernier par le Conseil d’agglomération de Québec. En vertu de l’article 74.4 de la Charte de la Ville de Québec, capitale nationale du Québec, l’administration municipale peut permettre la réalisation d’un projet qui est relatif « à de l’habitation destinée à des personnes ayant besoin d’aide, […] notamment dans le cadre d’un programme de logement social mis en oeuvre en vertu de la Loi sur la Société d’habitation du Québec ». Après la séance d’information et d’échanges d’hier soir, le règlement sera adopté au début du mois de juillet. Le projet de règlement vise principalement à autoriser l’usage d’hébergement transitoire pour une clientèle ayant des besoins particuliers sur l’emplacement du terrain ciblé.

Plusieurs voisins mécontents

Si la plupart des citoyens s’entendaient pour saluer la mission de l’organisme, bon nombre d’entre eux ont soulevé des inquiétudes par rapport à la localisation du futur centre d’hébergement. Une soixantaine d’individus étaient présents au Conseil de quartier de mercredi soir. Parmi eux, des intervenantes du Centre des femmes de la Basse-Ville (CFBV), situé à proximité du terrain ciblé par le projet, ont exprimé leurs craintes face à l’arrivée de personnes judiciarisées, potentiellement dangereuses dans le secteur.

Le terrain ciblé est visible des fenêtres du Centre des femmes de la Basse-Ville. (Photo: Google maps)

Une femme ayant eu accès aux services offerts par le CFBV a livré un vibrant témoignage sur son expérience passée et les craintes qu’elle avait de côtoyer des hommes lors de ces moments difficiles. « Quand on est une femme qui a survécu à la violence, c’est très fragile le processus de reprise en main. Lorsque j’étais hébergée au YWCA, juste le fait que des hommes venaient réparer les poignées de portes, j’ai paniqué pendant trois jours », a révélé cette dame, qui aide aujourd’hui d’autres personnes avec des difficultés à se trouver de l’emploi.

« Toutes les questions qu’on vous pose sont balayées du revers de la main. C’est très irrespectueux, j’ai l’impression qu’on rit de mon intelligence » – Une citoyenne présente au conseil de quartier

Des parents ainsi que des personnes âgées présents mercredi soir ont questionné M. De Koninck et les représentants de la Société John Howard sur le profil des personnes judiciarisées qui seront admises au sein de ces chambres. Jean-Claude Bernheim, président du conseil d’administration de la Société John Howard du Québec, leur expliquait que l’admission ne se fait pas en fonction du type de crimes commis mais plutôt selon la capacité de la personne à faire preuve d’une certaine autonomie. Il assure que le personnel sera suffisant pour répondre aux besoins de ces personnes.

Une soirée d’échange constructive selon le conseiller municipal

Le conseiller municipal du district Saint-Roch-Saint-Sauveur Pierre-Luc Lachance a tenu à rassurer les citoyens déçus de la procédure utilisée pour adopter le projet. Sans pour autant répondre à leur volonté de tenir un référendum sur le sujet, il a assuré que la Ville de Québec allait utiliser les commentaires des résidents pour s’assurer du bon déroulement du projet. « L’objectif de la soirée qu’on a eu ensemble est d’échanger et d’aider le politique à poursuivre le projet et de faire que les paramètres soient établis pour s’assurer que ce projet s’implante avec succès dans le quartier », a-t-il dit, en clôture de ce sujet qui a mobilisé 1h30 de la séance. De plus, il a annoncé qu’un plan de cohabitation sera mis en œuvre, il impliquera les différents organismes présents dans le secteur.

Le vice-président du comité exécutif, Pierre-Luc Lachance
Le conseiller municipal de Saint-Roch-Saint-Sauveur, Pierre-Luc Lachance. (Photo : Capture d’écran)

Marjorie Champagne, candidate de Transition Québec pour le district Saint-Roch-Saint-Sauveur à l’élection du 2 novembre prochain était également présente dans la salle du Centre communautaire Édouard-Lavergne pour la séance du conseil de quartier. Elle a exprimé aujourd’hui par communiqué son appui au CFBV. « Une option serait de réserver les logements de la Société John Howard à d’ex-détenues femmes. On nous parle souvent de continuum de services, et c’est exactement l’opportunité qui pourrait être saisie dans cette situation », suggère-t-elle. Jean-Claude Bernheim avait hier soir que cette suggestion n’avait pas été envisagé mais qu’elle n’est pas écartée pour autant. Toutefois, il a rappelé que la population judiciarisée est majoritairement composée d’hommes.

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