Je passe assez souvent, à pied et en vélo, sur la rue Saint-Benoit dans Saint-Sauveur. J’y circule aussi parfois en voiture. Vous savez, Saint-Benoit, c’est une de ces rues qui a été réaménagée en ce qu’on appelle une rue partagée.
Une chronique de Martin Claveau
C’est à coup de milliers de dollars et de pavés, qui n’ont rien à envier à ceux du Vieux-Québec, qu’on l’a métamorphosé pour améliorer la sécurité des usagers.
Vous ne connaissez pas cette rue? C’est normal, car elle est cachée entre la rivière Saint-Charles et le bout du parc Victoria. Pour y accéder, il faut quand même avoir affaire dans ce coin-là. J’ai assisté à cette transformation aux premières loges, mais, depuis que c’est terminé, je demeure perplexe.
Chaque fois que je passe sur ce tronçon, je me demande pourquoi on a fait tout ça pour cette rue-là spécifiquement, car je n’y voyais pas vraiment de problème. On a remplacé l’asphalte par des blocs insérés, on a éliminé de grosses portions de trottoirs pour planter des arbres et d’autres plantes et on a aussi coupé quelques places de stationnements.
L’étrange résultat de tout ça s’appelle donc une rue partagée, car tous les usagers, qu’ils soient piétons, cyclistes ou automobilistes se partagent la chaussée. Les voitures ne doivent pas rouler à plus de 20km heure sur ce segment. En théorie, tout ça a de l’allure, direz-vous, mais à l’usage, je trouve que c’est plutôt une déplaisance pour tout le monde.
Quand je circule là en vélo, j’ai toujours hâte de me « clairer » de la portion en interblocs en car je trouve ça déplaisant de rouler là-dessus comme ça saute tout le temps. Quand je passe en voiture ça fait un effet similaire aussi déplaisant. Finalement, quand je passe à pied, soit la soit plupart du temps, je stresse toujours de me faire pousser dans le dos par une voiture, car il n’y a plus de trottoir pour me réfugier, étant donné qu’on on a mis des arbres dessus.
La semaine dernière, alors que je passais en vélo, une petite dame, dans la soixante-dizaine avancée partageait cette belle rue, avec pas de trottoir, avec moi. Elle trainait un lourd sac roulant contenant visiblement son épicerie. Alors que je passais, à côté d’elle, surgit, derrière nous, un gars au volant de son F-150. Alors qu’il patientait derrière, la petite madame semblait visiblement désireuse de ne pas étirer ce long malaise. Le gars au volant du pick-up a fait son temps et s’est montré courtois. Cela dit, le simple fait de savoir qu’un camion attend dernière vous, que vous libériez la place, suffit à stresser n’importe quel piéton. Pour l’apaisement, on repassera, car un simple trottoir, aurait fait mieux que pas du tout dans ce cas…
Ça fait que, en fin de compte, je me demande encore ce que donne ce genre de projet? Esthétiquement le résultat a de la gueule et cette rue à des airs de Vieux-Québec, mais chaque fois que j’y passe, je me rapelle que ça ne sert jamais à grand-chose de réparer des choses qui ne sont pas brisées…
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