Dans le cadre de son plan de mise en œuvre accéléré, l’administration Marchand multiplie les projets de construction à Québec. Objectif : 80 000 nouveaux logements d’ici 2040.
Par Alexandre Morin
Pour y parvenir, la Ville ajuste ses règles d’aménagement et n’hésite pas à revoir certains Plans particuliers d’urbanisme (PPU). C’est le cas sur l’îlot Dorchester, où la hauteur maximale permise de 10 étages a été modifiée afin d’autoriser la construction d’une tour de 17 étages.
Ces changements suscitent toutefois des réactions chez certains citoyens, qui craignent de voir leur quartier transformé par des projets de plus grande ampleur. L’administration Marchand défend néanmoins sa stratégie d’accélération de construction en invoquant le faible taux d’inoccupation dans les logements locatifs, qui s’établissait à 1,6 % en 2022, et la nécessité de lutter contre la crise du logement.
Un plan particulier d’urbanisme (PPU) est un outil réglementaire de planification prévu par la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme. Il permet à une municipalité de préciser sa vision pour un secteur stratégique, d’en encadrer le développement et d’en harmoniser l’aménagement selon des objectifs spécifiques.
Marie-Pierre Boucher, membre du comité exécutif responsable entre autres du logement, explique que l’objectif de 80 000 nouveaux logements d’ici 2040 ne sort pas de nulle part. Des analyses, basées sur les faibles taux d’inoccupation dans les différents secteurs de la ville et la croissance démographique à Québec, justifient la nécessité de construire davantage.
« Il y a beaucoup de gens qui arrivent à Québec, autant de l’immigration international qu’interrégional aussi, Québec est attractif, et on veut maintenir Québec attractif […] on a une qualité de vie à Québec, on voit qu’il y a un intérêt pour les gens de venir s’installer à Québec, on veut pouvoir répondre à ce besoin-là », explique-t-elle.
« Il y a un déséquilibre de l’offre et la demande, donc la hausse des loyers, oui elle est due à la hausse des coûts de construction, mais elle est due aussi à un débalancement entre l’offre et la demande, qui donne beaucoup de pouvoir à l’offreur plus qu’au demandeur », ajoute-t-elle, d’où l’intention de l’administration Marchand de construire plus.
Ce déséquilibre, explique Mme Boucher, qui est aussi responsable de l’itinérance au comité exécutif, contribue également au phénomène.
Le logement social fait partie de la vision de la Ville pour contrer la crise du logement : « c’est majeur pour s’assurer d’avoir une offre pour tous […] c’est notre meilleure clé pour l’abordabilité d’avoir du logement social », explique Mme Boucher, ajoutant viser 20 % de logements sociaux à Québec.
Adapter les règles au contexte actuel
Ainsi, à l’heure actuelle, Mme Boucher souligne la nécessité de modifier les cadres réglementaires et les PPU, puisque le contexte a changé.
Selon elle, il est normal d’ajuster ces règles après plusieurs années, une ville évoluant constamment. Elle évoque entre autres le besoin de construire davantage en raison des faibles taux d’inoccupation, le désir de densifier, ainsi que d’autres enjeux d’urbanisme, comme en autres le projet de tramway.
« Là, on a un tramway qui s’en vient, faque ça envoie un message aussi de densification dans certains secteurs […] La ville, c’est un peu un écosystème qui est vivant. On ne peut pas penser adopter quelque chose et penser que ça va être figé dans le temps comme ça, parce qu’il y a plein de contextes. Il y a l’immigration, il y a la densification, les enjeux environnementaux, il y a tellement d’éléments qu’il faut qu’on vienne balancer pour trouver où on veut densifier, comment on veut densifier », indique-t-elle pour justifier les modifications au PPU.
Le tramway deviendra une pièce maîtresse du développement urbain de la ville : « Si on densifie à un endroit où les gens n’ont pas de transport en commun, ça va être le chaos sur les routes. »
Elle rappelle qu’au niveau environnemental, pour éviter l’étalement urbain et la congestion, il faut densifier, notamment en construisant en hauteur, et que le dernier plan d’urbanisme ne prenait pas en compte tous ces enjeux.
Pas de référendum pour l’îlot Dorchester
En réponse à la demande de la Coalition Dorchester qui réclame la tenue d’un référendum sur la modification du PPU dans le dossier du projet du Groupe Trudel sur l’îlot Dorchester, Mme Boucher rejette cette possibilité pour plusieurs raisons.
« On pourrait gouverner par référendum, ça allonge les processus, ça coûte cher […] puis sur ce terrain-là [îlot Dorchester] on a un stationnement laid en maudit. Un stationnement actuellement à ciel ouvert [à cet endroit] dans un contexte de pénurie de logements, contexte environnemental, on n’a pas le loisir [de refuser ce projet] », exprime-t-elle.
Des craintes légitimes
Malgré le désir de l’administration de construire plus, engendrant ainsi des craintes chez certains citoyens quant à l’arrivée de projets immobiliers de plus gros volume dans leurs quartiers, Mme Boucher dit tout à fait comprendre ces inquiétudes.
« C’est certain que ça dérange quand l’environnement change, j’ai des projets dans Charlesbourg aussi où on augmente les hauteurs […] les gens perdent la vue vers la ville. Quand ils se sont installés, ils avaient vue sur la ville. Si on leur demande ça vous dérange-tu, bin oui ça les dérange et c’est normal », donne-t-elle en exemple, ajoutant prendre en considération ces craintes dans le processus, notamment par le biais des consultations publiques.
« Je ne peux pas prendre une décision en fonction qu’il n’y ait zéro impact sur personnes d’autres, tout projet a un impact », ajoute-t-elle.
En dépit des inquiétudes que suscitent certains projets plus imposants, l’administration Marchand considère que l’adaptation des règles d’urbanisme demeure nécessaire pour répondre aux défis posés par la croissance démographique, la pénurie de logements et les enjeux environnementaux. Selon elle, ces ajustements permettront de mieux planifier le développement de la ville dans un contexte en constante évolution.
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