Quoi qu’on dise : Un étage à la fois

Quoi qu'on dise par Martin ClaveauMartin Claveau (Photo : archives Carrefour de Québec)

J’ai une question à 20 millions de dollars pour vous. Quelle est la différence entre un édifice de 100 logements de 18 étages construit sur un terrain et un autre de 100 logements construits sur 5 étages au même endroit? Réponse : l’empreinte au sol.

Dans un cas, on dégage de la place au sol en empilant des appartements et dans l’autre, on occupe toute la surface disponible avec du béton mur à mur. Si vous habitez près, pour vous, l’effet sera à peu près le même, en ce sens qu’il y a 100 nouveaux ménages qui vont s’établir dans votre coin. Le trafic augmentera de la même façon et la construction durera à peu près aussi longtemps. La seule différence en fait, c’est que certains verront dorénavant le soleil plus tard le matin à cause de l’ombre que leur fera la tour. Je sais que notre étoile est à la base de toute vie sur terre, mais je constate aussi que relativement peu de gens se prosternent devant de leur propriété pour adorer le dieu soleil le matin quand je fais mon jogging. Alors, dans les faits, ça ne change pas grand-chose qu’on ait un bloc de cinq ou 18 étages en face de chez soi. Le nombre de nouveaux voisins sera le même.

Tout ça pour dire que, comme membre du Conseil de quartier du Vieux Limoilou, j’ai assisté récemment à une présentation du promoteur Éric Gagnon, qui proposait la construction d’une tour de 18 étages dans Limoilou à la place de l’église Saint-François-d’Assise. Il s’agissait d’une consultation préliminaire et rien n’est encore définitif à ce sujet. Il a donc fait preuve de bonne volonté puisqu’il n’était absolument pas obligé de se prêter à l’exercice. Par contre, la réaction des citoyens a été un peu, ma foi, épidermique. En fait, c’est juste si le gars et son architecte, une résidente du secteur dont les enfants fréquentent la même école que ma fille, ne se sont pas fait lancer des tomates. Pour résumer, selon ce qu’à peu près tout un chacun répétait, on pourrait dire que les gens sont très ouverts aux changements pourvu que ça ne les affecte pas trop.

Passé le choc initial, un fait demeure : le paysage de ce coin de la ville va changer. Selon moi, les gens, et je m’inclus là-dedans, ne sont pas encore tout à fait vendu au credo de la nouvelle religion de la densification urbaine. Ils ont besoin d’être convaincus. La plupart sont prêts à accepter que leur voisinage change, mais pas trop vite. La logique dit qu’en matière de construction, dans une ville, on passe d’un étage à deux, puis trois, puis quatre, puis cinq et ainsi de suite. Mais, passer de cinq à dix-huit, c’est un brin violent et ça rend les gens mécontents.

Présentement, la Ville incite les promoteurs à construire en hauteur un peu partout. Les résidents de Saint-François-d’Assise se seraient bien accommodés de la construction de 14 maisons de ville sur le terrain de l’église. Le hic, c’est que la Ville ne voit pas les choses ainsi. Quatorze maisons de ville, furent-elles neuves, ne rapportent pas autant en taxes qu’une belle tour high-tech ou qu’un gros bloc d’appartements en ciment. Alors, selon toute vraisemblance et, malgré les doléances, le portrait du coin va changer comme celui des autres endroits où l’on réclame plus de densification. Faudrait juste que notre belle ville conviviale à dimension humaine ne soit pas trop pressée. Tirer sur une fleur ne la fait pas pousser plus vite.

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